Joan Miró, rêveur faisant rêver


Un Catalan international

Joan Miró né à Barcelone le 20 avril 1893 et décède à 90 ans à Palma de Majorque. Il grandit en Catalogne et après avoir commencé des études de commerce encouragées par son père, il se lance en parallèle dans une carrière artistique. Elève à la Llotja 20 ans après Picasso, il se démarque déjà par son utilisation des couleurs mais est frustré par une l’approche qu’il juge trop conventionnelle. Artiste incompris à Barcelone, il quitte la ville pour Paris dans les années 1920 en jurant alors de ne plus jamais y retourner. Il s’affirme comme Catalan international : l’origine de son art est sa Catalogne natale, mais il ne doit pas s’y limiter pour pouvoir s’exprimer.

« Il faut partir ! Si tu restes en Catalogne, tu meurs ! Il faut devenir Catalan international ! »

Joan Miró

Introduit à Paris dans le cercle des surréalistes, il est rapidement connu comme l’un des leurs notamment par l’importance qu’il accorde à l’onirisme. Si il se laisse d’abord porter par l’intuition pour commencer ses peintures, la suite est extrêmement travaillée pour permettre une cohérence générale. Son trait fin devient sa signature, et il attache aux détails une importance toute particulière. C’est à Paris qu’il développe réellement son langage poétique propre avec un vocabulaire des formes qui rend son style tout à fait identifiable.

Les références à sa terre natale et à la nature sont à la base de son œuvre. Cependant le climat de son siècle affecte son travail et sa vision. Miró tend au fur et à mesure des années vers une combinaison originale d’éléments tantôt inquiétants tantôt joyeux qui plongent dans l’inconscient, dans l’imagination et la poésie. Son monde est souvent magique et étrange. Au fil du temps, ses toiles deviennent plus abstraites et les formes plus organiques même si l’on y reconnaît toujours un thème.


Esprit libre et artiste engagé

Miró refuse d’être soumis à un dogme. En recherche artistique constante il se détache du mouvement des surréalistes, sans toutefois couper tout lien. En voulant « tuer la peinture » il cherche surtout à dépasser les codes qu’on lui a appris pour chercher toujours plus de spontanéité et d’expression au travers de ses œuvres. Le bleu devient sa couleur centrale, couleur du ciel et de la mer, immatérielle et mystérieuse. Profondément choqué par la montée du fascisme en Espagne il engage son art contre le franquisme. En 1940 il retourne vivre en Espagne, où il finira par s’installer définitivement avec sa famille. Là il élargie sa palette technique et artistique avec notamment la sculpture et la céramique. Artiste reconnu internationalement, il s’affaire lors des dernières années de sa vie à faire rayonner son œuvre en France et en Espagne en créant ou collaborant avec des fondations.

« Ce qui est important, ce n’est pas de finir une œuvre, mais d’entrevoir qu’elle permette un jour de commencer quelque chose. » – Joan Miró

Biographie en détails

En parallèle de son école de commerce qu’il suit à Barcelone il s’inscrit à des cours d’art à l’école de la Llotja. Son père le contraint alors à travailler comme employé aux écritures dans une entreprise de quincaillerie à 17 ans, mais le laisse que très peu de temps pour travailler son art. Déprimé, Miró contracte la typhoïde. Retiré dans la ferme familiale de Mont-roig, il décide en 1911 de se consacrer exclusivement à la peinture. Son retour à Barcelone est en demi-teinte : sa peinture, très inspirée du cubisme et dite détailliste s’éloigne des courants artistiques catalans, plus conservateurs, et le pousse à partir tenter sa chance à Paris. Il y fait son premier séjour en 1920 avant de retourner à Mont-roig pour l’été et s’installe définitivement rue Blomet en plein Montparnasse en 1921.

Il développe une création de codes qui lui est très propre. Il s’inspire des fresques romanes du musée Montjuic et est fasciné par l’infiniment petit. Sa vision est très poétique et donne un cadre de pensée artistique qui lui permet de s’exprimer et montrer ce qu’il ressent. Pour sa première exposition surréaliste à Paris en 1925, si il n’arrive pas à vendre les retours sont assez enthousiastes. Il réalise par la suite différentes séries comme « Peintures de rêves » (entre 1925 – 1927) et des « Paysages imaginaires » (entre 1926 et 1926). En collaboration avec Max Ernst, il travaille aux décors et costumes du ballet Roméo et Juliette, ce qui marquera une première rupture avec les surréalistes qui le critiquent pour travailler avec Diaghilev, le directeur. Sa volonté d’émancipation ne fera qu’augmenter et il déclare en 1927 vouloir « assassiner la peinture », c’est à dire ne plus s’y limiter pour créer. Il exécute alors ses premiers tableaux-objets et collages.

Ces années sont marquées par des expérimentations plastiques. Miró explore d’autres langages et utilise des matériaux vils, naturels ou manufacturés. Il confectionne les décors et costumes du ballet Jeux d’enfants, réalise la série de peintures monumentales « Peintures d’après collages » en 1933 puis se lance dans un cycle de peintures dites sauvages, remplies par des couleurs vives et des figures agressives. Il est alors exposé aux Etats-Unis et reçoit un accueil positif. Si il s’est détaché du surréalisme pour trouver son propre langage entre figuration et abstraction il continue de participer à certaines de leurs expositions. La montée du fascisme le préoccupe fortement et le déclenchement de la guerre civile espagnole affecte son art. Contraint de rester à Paris il se lance dans un nouveau réalisme et peint pour l’exposition universelle de Paris en 1937 un grand panneau mural, Le Faucheur, exposé dans le pavillon espagnol (voir ses œuvres).

De retour en Espagne il achève sa série magistrale des 23 Constellations. Maitre reconnu le Museum of Modern Art lui consacre une rétrospective en 1941 (découvrir d’autres expositions). Fin 1943, il accepte la commande Barcelona du galeriste Joan Prats où il doit réaliser une série de 50 lithographies. Cette commande lui permettra de le libérer et de lui permettre de reprendre la peinture sur toile. Celles qui suivent sont déroutantes par leur simplicité, leur spontanéité et leur désinvolture. Miró se libère également d’une peinture classique et peint sur des morceaux de toiles irréguliers qui lui permettent de développer un nouveau langage. En résultent des toiles comme Femme dans la nuit ou Au lever du soleil. En parallèle Miró continue d’élargir sa palette technique et entreprend ses premières sculptures et céramiques avec Josep Llorens i Artigas.

Installé à Mallorca (Majorque) avec sa famille, Miró réalise ses premiers grands triptyques, comme celui exposé au Centre Pompidou Bleu I, Bleu II et Bleu III. Il s’engagent pour porter son art et l’expliquer et crée deux fondations pour y afficher son art (plus d’informations ici). Pour la Fondation Maeght il réalise le Labyrinthe, ensemble de sculpture en collaboration avec Artigas. Artiste reconnu internationalement il effectue plusieurs séjours et commandes au Japon ou aux Etats-Unis, pays majeur pour la reconnaissance internationale de son art. Le 25 décembre 1983 il décède à Palma de Majorque.